vers une ratification de la charte sur les langues minoritaires

Cette campagne présidentielle est à l'évidence marquée par un phénomène de marketing inédit qui met l'offre (offre de programme politique) en constant défaut par rapport à la diversité extrême de la demande. Pour parler clair, la campagne s'apparente plus pour les candidats à un "tour de société" (il leur faut répondre aux interpellations de différents lobbies, aux lettres ouvertes de divers comités, préparer une réponse à chaque membre du panel représentatif réuni sur le plateau de 100 minutes pour convaincre...) qu'au tour de France habituel des meetings politiques.
Cela n'empêche nullement chaque groupe d'intérêt de se plaindre à tour de rôle de ne pas voir venir dans la campagne le "vrai débat" dans lequel il pourrait s'affirmer. Ces groupes savent que les concurrents à la présidentielle se marquent au maillot partout où les médias donnent leurs éphémères coups de projecteurs (une semaine sur l'université, une semaine sur la pauvreté, une semaine sur les délocalisations, une semaine sur la sécurité, sur l'environnement, sur les collectivités, etc.) Chaque lobby attend donc que le moment soit venu pour lui de prendre à partie les différents candidats et les sommer de répondre sous les caméras et sans hésitation à ses urgentissimes mises en demeure.
Ainsi les principaux candidats en lice, à l'exception notable de Jean-Marie Le Pen, ont répondu aux sollicitations des Amis du Pacte des langues (quand leur programme ne comportait pas déjà un article au sujet des langues minoritaires). Les Amis du pacte sont issus de divers mouvements pour la reconnaissance des principales langues régionales (Breton, Basque et Occitan notamment).
La question qu'ils ont posée aux candidats actuels est la suivante : en cas de victoire, ratifierez-vous la charte européenne sur les langues régionales ? (Je rappelle que cette charte a été en partie ratifiée sous le gouvernement Jospin, mais le conseil constitutionnel l'a obligé à faire marche arrière jugeant que certains articles de cette charte européenne étaient contraires à la constitution et notamment à l'article 2 qui stipule que la langue officielle en France est le français.)
Pour connaître la position de chaque candidat sur cette question, cliquer ici
Il y a d'un côté ceux qui ignorent la question ou qui ont eu des propos hostiles à l'égard de la cause des Amis du pacte (parmi les premiers : Shivardi et Laguiller, parmi les seconds : Le Pen et De Villiers)
Ceux qui parlent de façon très générale de reconnaître les langues régionales (Buffet)
ceux qui se déclarent prêts à défendre cette cause par la loi et la ratification de la charte : Bayrou et Royal
Ceux qui vont plus loin encore et proposent de modifier l'article 2 de la constitution (Besancenot et Voynet)
Nicolas Sarkozy parle à propos de cette proposition de réforme de l'article 2 de "mystification" et se déclare néanmoins favorable à l'extension de l'enseignement des langues régionales :
"Selon moi, le ministère de l'éducation nationale doit également définir le niveau d?exigence à atteindre dans les classes bilingues français-langue régionale de 3e, dans la langue régionale et dans la discipline évaluée en langue régionale (histoire-géo). Et si pour cela il faut modifier les textes, pour lever toute ambiguïté, je le ferai.
Je suis favorable à ce que le droit des parents à inscrire leurs enfants dans une classe bilingue français-langue régionale soit reconnu, dès lors que la demande est suffisante."
Sur cette question, je crois avoir suffisamment donné mon avis dans mon article du 29 mars : notre constitution doit être revisée et l'Etat doit prendre en charge l'enseignement des langues régionales (enseignement facultatif dans la langue de la région) au nom de la diversité culturelle. Ceci aurait l'avantage de mettre notre pays en accord avec les principes qu'il défend parmi les autres membres de l'Union européenne à l'OMC et à l'UNESCO.