Réponse à Géronimo sur l'Iran
Merci, Géronimo, pour ces deux commentaires.
Voici ma réponse : Autant les sites et les articles de journaux qui parlent de la censure exercée contre le film Persépolis par le Président de la Sûreté Générale libanais « pour ne pas jeter de l’huile sur le feu » ne manquent pas, autant je ne trouve rien dans la presse francophone ni anglophone (sondée avec la base de données Factiva) sur l’interdiction de Valse avec Béchir au Liban. Peux-tu me dire d'où tu tiens cette information ? Merci d'avance. La décision de censurer ce film serait particulièrement absurde compte tenu du fait que -en dehors de la culpabilité des soldats israëliens à l'égard de ce qui s'est passé à Sabra et Chatilah, Valse avec Béchir est et se veut un film qui transcende la politique et les partis et montre la guerre dans sa crudité et son absurdité.
A l’occasion de mon article, tu demandes pourquoi l’Occident (moi même compris) se focalise sur l'Iran. La réponse, -tu dois t’en douter- tient à la question du nucléaire iranien qui préoccupe l’Europe et les Etats-Unis (encore plus par les temps qui courent les Etats-Unis car les candidats à la Maison Blanche devront se démarquer sur la question iranienne).
C'est vrai que mon intérêt pour ce pays est aussi motivé par le contexte culturel dans lequel nous sommes en France. Ici, nous sentons qu’il y a à Téhéran et à Shiraz une intelligentsia mûre pour la "vraie" révolution démocratique. De plus la diaspora iranienne est très active pour atticrer l'attention de l'occident sur le fait que les choses ne peuvent plus durer telles qu'elles sont ( Chadortt Djavan, l'auteure de Bas les voiles ! lors de la commission Stasi sur le port du foulard islamique, puis plus récemment Shirin Ebadi depuis qu'elle est lauréate d'un Nobel ont une forte audience dans notre pays).
Enfin, le cinéma iranien est prolifique et relativement bien connu en France (Samira Makhmalbaf, Abbas Kiarostami. De ce dernier, j'ai vu "Où est la maison de mon ami ?", film projeté dans le cadre de "Lycéens au cinéma" et Ten qui a -comme on dit- suscité l'événement à sa sortie au Festival de Cannes, à cause de sa facture originale et d'une scène célèbre où une femme enlève symboliquement son voile, cf ici).
En Arabie Saoudite, on ne sent pas cette volonté réformatrice de la part des intellectuels. Du moins, rien de ce type ne parvient jusqu'en Occident par la médiation des expatriés ou du cinéma. Dans ma vie de cinéphile, j'ai vu beaucoup de films égyptiens, des films libanais, algériens, palestiniens, afghans même, mais de films en provenance d'Arabie Saoudite, jamais. C’est comme si le royaume Saoudien s’était rendormi dans son sommeil séculaire après la brève cavalcade de Laurence d’Arabie.
Moi, ce qui me fascine dans l'histoire de ce pays, c'est la transition démocratique manquée de 1978-1979. Pendant trois mois, les iraniens qui avaient renversé le Shah au prix de nombreuses vies ont pu respirer un air de liberté, avant que cette révolution ne soit confisquée au cours d’un étrange tour de passe-passe par les fondamentalistes religieux.
La révolution de 1979 qui fut un échec pour l'accession aux libertés démocratiques et au réalisme économique figure en bonne place dans mon "hantologie" personnelle parmi les autres révolutions avortées des années 70.
La déception qui a saisi beaucoup d’observateurs politiques de cette époque mouvementée était doublée plus récemment, en 1997, par l’échec de la politique réformatrice de Khatami. Cette fois, j’étais assez âgé pour ressentir moi-même l’importance de ce rendez-vous manqué avec la démocratie.
Par ailleurs, depuis que j’ai découvert, il y a plusieurs années la poésie persane en lisant les quatrains d’Omar Khayyam et les gâzals d’Hafez, je place ce pays assez haut dans mon imaginaire géographique.